
"On est dans l’anodin, mais c’est dans cette apparente banalité, ce quotidien si familier, que se nichent parfois les questionnements existentiels les plus profonds et les plus universels."
Née en 1981 dans le Drôme, Julie Durieu ne pratique pas la photographie depuis l’enfance mais ce médium est là depuis toujours. Il est d’abord une porte d’entrée dans la vie de ses parents, celle d’avant sa naissance. Par ses clichés, Julie accède à ce qui la précède, ils renferment tous les secrets qui l’ont faite, toute une intimité, et petite, c’est avec eux qu’elle commence à construire le récit de sa propre histoire.
A l’adolescence, une curiosité, une attirance pour cet art se font jour. Julie utilise jetables, numériques, argentiques, par caprice, en pointillés. Elle prend surtout des photos de manifs, de blocages à l’université puis laisse de côté les appareils.
En 2018, elle rencontre François Calavia avec qui elle crée l’ouvrage de photo-poèmes Mille soleils, un crépuscule. Lui à la photo, elle à l’écriture. C’est avec ce travail qu’il l’initie à l’argentique. Elle récupère le PentaxMG de son père et l’embarque au Vietnam le pays d’origine maternel. L’appareil devient un objet magique, une relique, un peu comme si elle avait amené avec elle son regard à lui. Par rapport à son histoire personnelle, la symbolique est forte.
Le lien qu’elle entretient avec la photographie est affectif et sensuel. Il répond à une démarche poétique, intime mais aussi sociale. Sans jamais être dans la démonstration, les images qu’elle réalise ont leur propre langage. Elle photographie le plus souvent quand elle marche ; c’est une photographie qui s’inscrit dans son quotidien, le chemin pour aller au travail, les balades, la famille. Julie s’accroche aux détails, compose des images qui de façon instantanée font sens pour elle, propose l’écriture d’un récit qui se passe de discours. Elle cherche à ce que le spectateur libre dans sa sensibilité épuise le sens de ce qui est montré et de ce qui n’est pas dit en s’attachant à la fois au signifiant et au signifié. « On est dans l’anodin, mais c’est dans cette apparente banalité, ce quotidien si familier, que se nichent parfois les questionnements existentiels les plus profonds et les plus universels. »